* Weltwaerts

Posted on janvier 20th, 2009 by Pierre. Filed under Non classé.


Il y a de nombreux volontaires européens à Kpalimé, appartenant à des associations aussi nombreuses que variées. Il faut dire que cette ville est le centre principal du volontariat au Togo — du moins depuis le départ des coopérants, que l’on envoyait presque exclusivement dans la région des Savanes. Au hasard des fêtes, des anniversaires, des pots de départ ou des soirées sans prétexte dans les bars de la ville, nous rencontrons de plus en plus de volontaires, en dehors de ceux d’ASTOVOT que nous connaissons maintenant bien.

Et j’entends d’ici la question que vous vous posez tous : mais enfin, nous dira-t-il qui ils sont, ces volontaires ? Jusqu’à quand abusera-t-il de notre patience ? D’où viennent-ils, pourquoi sont-ils ici, quelles sont leurs passions, leurs aspirations ? La réponse ne peut être que multiple, tant les personnalités sont complexes — mais tentons un résumé hardi. Le profil-type du volontaire au Togo est : allemande.

En effet, on est étonné de la quantité de jeunes allemandes parmi les volontaires européens. Vous qui craigniez que je me fasse envoûter par une belle africaine à la peau d’ébène, rassurez-vous : pour toutes sortes de raisons, il y aurait plus de chance que ce soit par une belle allemande aux cheveux blonds. Beaucoup plus d’allemands que de français, donc, et beaucoup plus de filles que de garçons — d’ailleurs, s’il s’agit d’un garçon, il est probable que sa copine se trouve également à Kpalimé. Oh, et aussi, ces volontaires allemands sont souvent jeunes : la plupart ont tout juste 19 ans et ont débarqué au Togo au sortir du Bac. Tenez, rien qu’à ASTOVOT, il y a environ une douzaine de volontaires allemands (dix filles et deux garçons) ; ils ont presque tous 19 ans, et la plupart sont au Togo pour environ un an. Les volontaires français, eux, sont cinq en moyenne (en nous incluant dans le compte), et ne sont là que pour quelques mois seulement.

Au fur et à mesure des soirées, nous nous interrogeons sur cette répartition. Qu’il y ait plus de filles que de garçons, passe encore : peut-être les filles acceptent-elles plus fréquemment de prendre une année avant ou pendant leurs études pour partir découvrir d’autres horizons — surtout en Allemagne, où la pression des études reste moins forte sur les filles, dont on n’attend pas qu’elles nourrissent le foyer. Mais pourquoi tant d’allemands ? À force de discuter avec eux, nous avons glané des éléments de réponse.

En Allemagne, le service militaire est toujours en vigueur — mais il peut prendre la forme d’un service civil d’un an, à effectuer par exemple dans une association « humanitaire ». Des agences fédérales se chargent donc d’organiser des programmes de volontariat pour les jeunes allemands le désirant. Cela ne concernait à la base que les garçons, mais certaines de ces agences se sont ouvertes aussi aux filles qui, sans y être obligé, désiraient également participer ce genre de service ou de mission.

C’est le cas de Weltwaerts (traduisible grossièrement par « Tourné vers le monde ») : cette agence fédérale allemande a encadré la venue de la plupart des volontaires allemands de Kpalimé. Ils ont été sélectionnés sur leur motivation et leur connaissance du français ; en vertu de quoi leurs frais de séjour sont pris en charge par le gouvernement allemand, qui verse à leur place l’intégralité de la pension demandée par l’association (ASTOVOT, Campagne des Hommes, etc.), et leur donne même de l’argent de poche — et cela pendant un an. Pas mal, non ?

Mais surtout, dans un contexte général, les jeunes allemands sont plutôt encouragés à prendre une année de césure à un moment ou à un autre — souvent juste après leur Bac, avant de commencer les études. D’où le nombre important de jeunes volontaires allemands que nous voyons autour de nous.

Alors forcément, on se met à comparer. En France, manifestement, on a beaucoup moins cette culture du projet ou de l’année de césure ; et lorsque les gens partent dans ce genre de volontariat, c’est plutôt vers la fin de leurs études. Car après le baccalauréat, il faut commencer tout de suite ses études, vite, des fois que les gens se demanderaient… quoi au juste ? On ne sait pas trop, mais il n’est pas vraiment question de « perdre » un an — comme s’il y avait urgence à la sortie du lycée. D’autre part, même si l’on part une fois les études presque achevées, voire totalement terminées, les gens vous regardent parfois d’un drôle d’œil, en se demandant bien ce que vous allez faire là-bas. Bref, ce n’est pas dans nos habitudes : imaginez-vous vos réactions si votre fille de 18 ans vous annonçait son départ pour un an au Burkina-Faso ? En Allemagne, ce serait assez normal.

Pour ma part, je trouve le modèle allemand assez sympathique : d’une part, il propose vraiment aux gens de partir dans ce genre d’aventure, et c’est admis par tout le monde — ce qui rend les choses bien plus faciles de beaucoup de points de vue. D’autre part, cela permet aux bacheliers, qui n’ont pas toujours une idée bien précise des études qu’ils veulent faire, de prendre du recul et d’aller voir quelque chose de différent pendant un an. En France, on les collerait en fac de droit ou en prépa commerce, selon les milieux — ce qui n’empêcherait pas de considérer avec une légère opprobre tout changement ultérieur d’orientation. D’autre part, ces volontaires reviennent ensuite au pays avec un regard critique autrement plus affûté sur leur environnement, juste au moment de commencer leurs études : je trouve cela plutôt positif.

Elise a tout de même entendu et se rappelle en ce moment qu’un des meilleurs moments pour découvrir le monde est justement à la fin de ses études, au moment où le regard critique, entraîné par des années de réflexion, est le plus vif et le plus développé. Elle a sans doute raison : de fait, je me demande si les jeunes allemands n’ont pas moins de distance et de recul sur la vie quotidienne ici que des volontaires de quelques années leurs aînés. Tout de même, l’idée qu’un pays assez proche du nôtre considère comme tout naturel ce genre de départ me fait plutôt plaisir.

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3 Responses to “Weltwaerts”

  1. Zatoichi Says:

    Et quel est l’opinion d’Elise sur les belles allemandes aux cheveux blonds ?

  2. Pierre Says:

    Aaah, je la laisse répondre elle-même à cette question…

  3. Elise Says:

    Ecoute, je pense qu’on peut en trouver au moins une qui répond réellement à cette description, mais elle habite à Agou, c’est à dire pas dans la même ville que nous…

    D’ailleurs, parlons de choses plus importantes : tu as perdu ton téléphone et le mot de passe de ton compte mail, récemment ?

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